Je me propose de vous faire découvrir une curieuse fonderie d'or et d'argent bien cachée derrière la façade du 39 rue des Francs-Bourgeois au cœur du Marais . A cet emplacement se trouvait en 1639 l'Hôtel Le Tellier ayant appartenu à Philippe de Coulanges , oncle de la célèbre épistolaire Marie de Rabutin-Chantal , plus connue sous le nom de Marquide de Sévigné . Elle y séjourna avec son autre oncle Christophe de Coulanges , abbé de Livry , et s'y maria en 1644 avec le Marquis de Sévigné .
Madame de Sévigné Fonderie d'or et d'argent 39, rue des Francs-Bourgeois
Lors d'une de mes promenades dans ce quartier j'avais été interloqué par l'inscription qui figurait sur le fronton de cette fonderie d'or et d'argent : " Traitements des cendres " . De quoi pouvait-il bien s'agir ? Nous allons découvrir ensemble l'histoire de cette petite fonderie d'or et d'argent située en plein cœur du Marais .
La rue des Francs-Bourgeois
Rue des Francs-Bourgeois
Cette rue résulte de la fusion des rues suivantes : 1° entre les rues de Turenne et Payenne et la rue Saint-Catherine au XVIème siècle ; 2°entre les rues Payenne et Vieille-du-Temple . Cette vieille rue se nomma d'abord rue des Poulies, des Viez Poulies ou Vieilles Poulies 1258 , Richard des Poulies et Ferri des Poulies, à cause de ses métiers de tisserands . Elle a pris son nom actuel après que furent fondées, en 1334 , des « maisons d'aumônes » dont les occupants , affranchis de taxes en raison de leurs faibles ressources , étaient appelés « francs-bourgeois », et dont l'une se nommait maison des Francs-Bourgeois , hôpital pour bourgeois miséreux . On lui donna le nom de « rue des Francs-Citoyens » pendant la Révolution , 3°entre les rues Vieille-du-Temple et des Archives , une rue appelée , en 1287 des Jardins à cause des jardins situés près des remparts de l' enceinte de Philippe-Auguste , puis en 1291 Paradis , ce nom provenant d'une enseigne proche . Ces trois rues fusionnèrent en 1868 sous le nom de Francs-Bourgeois . Elle sera prolongée jusqu'à la place des Vosges par absorption en 1606 d'une rue appelée successivement rue Henri IV , de l'Echarpe-blanche en 1636 , de l'Echarpe au XVIIIème siècle puis des Vosges .
Rue des Francs-Bourgeois
La Société des Cendres et la Fonderie d'or et d'argent
La Société des Cendres , qui comptait pas moins de 500 actionnaires , a été crée par Alexis Falize ( 1811- 1898 ) en 1860 .Tout d'abord grand spécialiste des émaux , il redécouvre les émaux limousins avec ses confrères Jules Chaize , Eugène Fontenay et Frédéric Boucheron . Il deviendra ensuite un célèbre bijoutier sous le Second Empire . La Société des Cendres avait pour but de traiter les poussières de balayage , les rognures et les limailles provenant des bijoutiers et des joailliers nombreux dans ce quartier afin de récupérer l'or et l'argent dans les déchets . Les dentistes , les photographes et les graveurs se joignirent également aux clients de la Société des Cendres . Les déchets de toutes sortes étaient broyés et brûlés sous le contrôle des propriétaires . On pouvait parfois extraire plusieurs kilos d'or d'un quintal de déchet !!! Tout d'abord installé rue Saint-Croix-de-la-Bretonnerie , elle se fixe définitivement rue des Francs-Bourgeois sur les ruines de l'Hôtel Le Tellier à l'emplacement de la mairie de l'ancien VIIe arrondissement de Paris , qui en comptait douze avant que Napoléon III les étende à vingt en 1860
Alexis Falize Emaux limousins Création d'Alexis Falize
Construit en 1885, pour les besoins spécifiques de la Société des Cendres , sur les ruines du grand hôtel Le Tellier , à l'emplacement de la mairie de l'ancien VIIe arrondissement de Paris , qui en comptait douze jusqu'à ce que Napoléon III les étende à vingt en 1860 , il comporte dans sa partie arrière une galerie industrielle et un four avec sa cheminée en briques rouges de 35 mètres de haut que l'on aperçoit de la verrière et qui est visible des immeubles voisins . Cette cheminée monumentale s'appuie sur un élément de la muraille de Philippe-Auguste, qu'on peut voir à l'intérieur.
Cheminée de la Société des Cendres Muraille de Philippe-Auguste (Site Paris bise-art ")
Fermée en 2002 l'entreprise est maintenant installée à Vitry dans le Val de Marne , mais elle reste toujours propriété du site . Des travaux de restaurations seront effectués sous le regard des Architectes des Bâtiments de France afin de créer un petit musée avant l'installation de son nouveau propriétaire le géant japonais de l'habillement Uniqlo ( groupe " Fast Retailing ) qui compte y ouvrir son troisième magasin français . Une procédure de classement à l'Inventaire des Monuments Historiques sera prochainement lancée . On peut encore admirer au sous-sol la meule à ferraille , à l'étage le four et au rez-de-chaussée la magnifique cheminée que l'on aperçoit à travers la verrière au , vedette sans conteste de ce lieu , dernier vestige industriel du quartier du Marais !!!
Meule à ferraille Four de cuisson Cheminée monumentale
En espérant , que comme en 2011 , vous pourrez découvrir ce lieu insolite à l'occasion des " Journées du Patrimoines " qui auront lieu le samedi 15 et le dimanche 16 septembre 2012 . Ne manquez sous aucun prétexte cette visite qui en vaut grandement la peine, si toutefois elle est programmée cette année encore !!!
JMB